171 milliards de dettes impayées : le secteur bancaire gabonais dans la zone rouge | Gabonreview.com | Actualité du Gabon |

171 milliards de dettes impayées : le secteur bancaire gabonais dans la zone rouge | Gabonreview.com | Actualité du Gabon |

 

En 2024, le portefeuille des créances douteuses des banques gabonaises a bondi de plus de 30 %, atteignant un niveau inédit de 171 milliards de FCFA. Un choc qui fragilise la distribution du crédit, menace la stabilité financière et place le système bancaire national au point de bascule.

Les créances douteuses ne sont pas que des chiffres : elles sont la cicatrice visible d’une économie à bout de souffle. © GabonReview

 

En un an, le montant des prêts que les banques ont peu de chances de récupérer est passé de 130,7 à 171 milliards de FCFA, soit 17,1 % de tous les crédits accordés. Même après avoir mis de côté des réserves pour couvrir ces pertes, il reste encore 88 milliards à risque, l’équivalent de 8,8 % du total des prêts. Cette hausse spectaculaire rompt avec la légère baisse observée en 2023 et s’inscrit dans une tendance continue à la hausse depuis 2019.

Une fragilité qui dure

Cette situation n’est pas nouvelle. Déjà en 2017, les créances douteuses atteignaient 142,3 milliards de FCFA, avant de grimper à 151,5 milliards en 2018. Un recul avait été enregistré en 2019 (118,5 milliards), mais depuis, la courbe est repartie à la hausse année après année. La Commission bancaire de l’Afrique centrale (COBAC) considère désormais ce problème comme une faiblesse structurelle du système bancaire gabonais.

Le phénomène touche aussi la microfinance. Sur les 18 établissements présents au Gabon, beaucoup subissent une hausse des impayés, ce qui limite l’accès au crédit pour les ménages et les petites entreprises. Dans toute la zone CEMAC, la situation est similaire : le taux des créances en souffrance est passé de 16,7 % à 17,4 % en seulement trois mois, après avoir presque quadruplé en dix ans.

Les causes de la dégradation et le risque pour toute l’économie

La Cobac explique cette dérive par deux types de facteurs. D’abord structurels : un manque de vigilance dans l’analyse des risques, une gouvernance interne insuffisante et des objectifs commerciaux parfois privilégiés au détriment de la prudence.

Ensuite, conjoncturels : des finances publiques fragiles, des retards de paiement de l’État à ses fournisseurs, les difficultés persistantes après la crise du Covid et un ralentissement global de l’économie.

Or, quand les créances douteuses augmentent, les banques prêtent moins ; ce qui freine l’investissement, bloque l’initiative privée et limite la création d’emplois. Dans un pays où le crédit bancaire reste un moteur essentiel de l’économie, cette situation peut avoir des conséquences durables.

Pour éviter une crise plus grave, la Cobac et la BEAC recommandent de renforcer la gestion des risques, de mettre en place des garanties publiques ciblées, d’améliorer le recouvrement des dettes et de revoir les stratégies de prêt.