Législatives et locales : un quitus qui écarte, soupçon de ruse administrative | Gabonreview.com | Actualité du Gabon |

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À l’approche des législatives et locales des 27 septembre et 11 octobre prochains, un document concentre déjà toutes les attentions : le quitus de la Cour des comptes. Dans un communiqué diffusé par le ministère de l’Intérieur, il est exigé des candidats à la présidentielle du 12 avril dernier souhaitant se représenter que leurs comptes de campagne aient été approuvés par la juridiction financière. Une obligation à fort potentiel éliminatoire, que certains, à l’instar d’Alain-Claude Bilie-By-Nze, dénoncent comme un instrument de disqualification politique.

Alain-Claude Bilie-By-Nze reste droit dans ses bottes en attendant la décision de la Cour constitutionnelle. © GabonReview

 

Le communiqué est formel : en vertu de l’article 77 du Code électoral, «le quitus dont il s’agit est un document portant approbation des comptes de campagne délivré par la Cour des comptes aux seules personnes ayant été candidates à l’élection présidentielle du 12 avril 2025 et désireuses de se porter candidates à l’une des élections prévues pour le 27 septembre 2025». Ce quitus vise aussi à attester de leur éligibilité, selon l’article 371, alinéa 2 du même Code. Le ministère précise que cette obligation ne s’applique qu’aux anciens candidats à la présidentielle, et non aux nouveaux venus.

En clair, seuls les candidats qui étaient en lice en avril dernier doivent avoir déposé leurs états de campagne à la Cour des comptes, comme l’exige l’article 369, et obtenu une validation. Ceux qui ne s’y sont pas conformés se retrouvent de facto disqualifiés. Parmi les concernés, une figure se détache : Alain-Claude Bilie-By-Nze. L’ancien Premier ministre, devenu l’un des opposants les plus en vue, n’a pas transmis ses comptes à la Cour des comptes. Il en conteste d’ailleurs la compétence en matière électorale. La mesure, pour lui, vise moins à garantir la transparence qu’à restreindre l’accès au scrutin.

Bilie-By-Nze dénonce une manœuvre politique

Réagissant vivement au communiqué, Bilie-By-Nze a dénoncé une dérive administrative. « Le communiqué du ministère de l’Intérieur, prétendant statuer sur l’éligibilité de certains citoyens en se fondant sur l’article 77 de la loi n° 001/2025, est non seulement juridiquement infondé, mais constitue un grave précédent institutionnel», a-t-il affirmé. Il estime que seul un jugement définitif peut établir l’inéligibilité d’un citoyen. « Tant qu’aucune décision de justice définitive n’a été rendue par les juridictions compétentes, comme le prévoit expressément l’article 369 du Code électoral, nul ne peut être présumé inéligible », insiste-t-il.

Pour lui, il s’agit ni plus ni moins d’une stratégie d’exclusion. « C’est là un danger majeur pour notre démocratie. Car ce n’est pas la loi qu’on applique ici, c’est le pouvoir qu’on étire jusqu’à l’abus», a-t-il lâché. Il avait déjà saisi la Cour constitutionnelle pour contester cette lecture du Code électoral. La juridiction devra trancher sur un point de droit crucial : la Cour des comptes peut-elle, à elle seule, par son silence ou sa non-délivrance d’un quitus, rendre un candidat inéligible sans décision judiciaire formelle ? En attendant, l’affaire crée un malaise dans le climat électoral.

Si la transparence des comptes de campagne est un impératif démocratique, l’utilisation administrative du quitus comme filtre est déjà perçue comme un glissement préoccupant vers une sélection politique par voie indirecte. L’issue de ce bras de fer dira beaucoup de la maturité du processus démocratique en cours.