SEEG : vingt ans de négligence, 475 milliards de rattrapage | Gabonreview.com | Actualité du Gabon |

SEEG : vingt ans de négligence, 475 milliards de rattrapage | Gabonreview.com | Actualité du Gabon |

 

Le Grand Libreville peinant à sortir de la crise électrique sans précédent de son histoire, l’Administrateur provisoire de la SEEG, Steeve Saurel Legnongo, a dévoilé l’ampleur du défi financier qui attend le secteur énergétique gabonais : 475 milliards de FCFA seraient nécessaires pour remettre à niveau des infrastructures vieillissantes, certaines datant d’un demi-siècle. Face à ce gouffre d’investissement révélé par un audit d’EDF, la solution des centrales flottantes à 1,8 milliard mensuel apparaît comme un pansement sur une plaie ouverte depuis deux décennies d’immobilisme.

Face aux 475 milliards de FCFA nécessaires pour moderniser le réseau, les 1,8 milliard mensuels versés à Karpowership sont le prix d’urgence de vingt ans d’immobilisme. © GabonReview

 

Le débat sur le coût de la solution d’urgence aux délestages électriques dans le Grand Libreville a été clarifié. Il persiste cependant dans certains foras et chaumières. Dans un entretien exclusif à nos confrères de L’Union, Steeve Saurel Legnongo, Administrateur provisoire de la SEEG, a pourtant confirmé que la société déboursera 1,8 milliard de francs CFA mensuels pour l’apport de 70 MW supplémentaires, et non les 15 milliards évoqués dans certains médias.

Un démenti formel sur la polémique financière

«Afin d’assurer l’exécution du protocole signé, la SEEG réglera un montant mensuel de 1,8 milliard de francs CFA pour la fourniture de 70 MW», a affirmé sans ambiguïté, le 20 février, Steeve Saurel Legnongo. Ce qui doit mettre fin aux spéculations ayant agité l’opinion publique gabonaise. Cette précision est intervenue après la signature, le 15 février 2025, d’un protocole d’accord entre la SEEG, l’État gabonais et le groupe turc Karpowership (KPS).

L’Administrateur provisoire a détaillé la répartition des responsabilités dans ce contrat : «L’État gabonais prendra en charge la fourniture du fuel, et KPS s’est engagé à passer à un fonctionnement au gaz naturel dans un délai de deux mois à compter de la date de signature du protocole.» Un arrangement qui permet de maintenir les coûts à un niveau gérable pour la SEEG, tout en prévoyant une transition vers une source d’énergie moins polluante.

Les centrales flottantes déjà en phase de test

Les solutions commencent à se concrétiser sur le terrain. «Une centrale flottante de 70 MW est en phase test de mise en service», a révélé Steeve Saurel Legnongo. Ces unités de production, déjà raccordées au réseau électrique gabonais, représentent la réponse immédiate à la crise. «Elle va participer à la stabilisation du réseau et garantir une qualité de service acceptable», a-t-il précisé, offrant ainsi une lueur d’espoir aux habitants du Grand Libreville confrontés depuis cinq mois à des coupures intensives.

Ces installations arrivent dans un contexte particulièrement tendu, le dirigeant de la SEEG rappelant à ce propos qu’«aucun investissement structurant n’a été réalisé ces 20 dernières années, alors même que les besoins en consommation énergétique ont pratiquement doublé entre 2010 et 2024».

L’ampleur du défi est considérable, comme l’a révélé Steeve Saurel Legnongo : «A la demande de la SEEG, un audit réalisé par EDF sur l’ensemble du système électrique (production-transport-distribution électricité) en 2019 a révélé que 475 milliards de FCFA étaient nécessaires pour renouveler les investissements des ouvrages, devenus obsolètes et vieillissants pour la plupart». Ce montant colossal témoigne du retard accumulé en matière d’infrastructures et explique en grande partie l’incapacité actuelle de la SEEG à répondre aux besoins énergétiques du Grand Libreville. «Nous avons un gap énorme entre les attentes, c’est-à-dire les besoins de l’économie Gabonaise et ce qui a pu être réalisé en termes d’investissements», a-t-il précisé, pointant l’inadéquation entre le rythme des investissements et celui de la croissance de la demande.

Des investissements complémentaires pour le Grand Libreville

L’initiative Karpowership n’est qu’une partie de la réponse globale. «Nous poursuivons les travaux de pose du câble ACCC sur le réseau électrique», a indiqué Steeve Saurel Legnongo. Ce conducteur en fibre carboneest résolument une avancée technologique majeure qui «augmentera la capacité de transit de puissance de la ligne Haute Tension sur le tronçon 90 kV Owendo-Bisségué».

Sur le plus long terme, l’Administrateur provisoire annonce également des négociations pour «la mise en place d’un projet BOOT (Build, Own, Operate, Transfer) en joint-venture pour une centrale électrique terrestre de 150 MW» avec les mêmes partenaires. Une solution qui doublerait la capacité actuellement apportée par les centrales flottantes et offrirait une réponse plus pérenne aux besoins du Grand Libreville.

Les efforts de la SEEG s’inscrivent dans une vision plus large de redressement, avec l’acquisition prévue d’«équipements lourds pour cette année 2025 pour couvrir les besoins de nos clients». Steeve Saurel Legnongo n’a pas moins souligné néanmoins que la situation reste préoccupante avec «un parc vétuste dont l’âge moyen des groupes thermiques est de 30 ans et celui des groupes hydroélectriques de 50 ans», bien au-delà de leur durée de vie théorique.